Les collections en libre accès de la bibliothèque sont disponibles tout autour de la salle Labrouste et dans le Magasin central. Leur organisation en grands corpus est décrite sur cette page. Nous présenterons ici plus en détail la classification de bibliothèque qui permet de ranger ces ouvrages au sein de ces corpus.

La classification de la Bibliothèque du Congrès

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Pour organiser le contenu du libre accès au sein de chaque corpus, il a été décidé d'avoir recours à la classification de la Bibliothèque du Congrès (Library of Congress Classification, abrégée en LCC). Classification alphanumérique, universelle et en anglais, la LCC organise les documents en fonction de leur contenu. Elle a été créée à la Bibliothèque du Congrès, à Washington, en 1897 et est toujours utilisée et développée par cette institution.


Une cote de la LCC se compose de deux parties :

  • un indice de classification qui rend de façon précise le sujet principal de la ressource
  • un élément complémentaire pour le rangement du livre (généralement des lettres pour identifier l'auteur, l'année de publication et éventuellement une tomaison).


L'indice indique le domaine auquel le document appartient, en le désignant par une ou plusieurs lettres. Par exemple, la lettre N est attribuée à la classe "Fine Arts" (Art et Beaux-Arts), qui se subdivise en chacun des Beaux-Arts par l'ajout d'une seconde lettre : NA pour l'architecture, NB pour la sculpture, NC pour le dessin, etc.
Ces lettres sont suivies de chiffres (nombres entiers de 1 à 9999 au maximum, en ordre algébrique) précisant la place dans la structure du domaine, c'est-à-dire le sujet précis de l'ouvrage.

Exemples  
N8600 Economie de l'art, ouvrages généraux
NA1068.5.M63 Histoire de l'architecture en Allemagne au XXe siècle, par mouvements : mouvement moderniste

 

En outre, il existe différents moyens de préciser davantage un sujet :

  • une extension décimale qui s'ajoute à l'indice de base et vient le préciser.
Exemple  
N71 Psychologie de l'art
N71.5 Art et maladies mentales

 

  • la possibilité de listes illimitées de sujets dépendant d'un sujet, sous la forme de liste alphabétique :
Exemples  
CC115.A-Z Biographies d'archéologues, classées dans l'ordre alphabétique
CC115.D4 Biographie de Joseph Déchelette

CC115.S85

Biographie de Eugénie Sellers Strong

Par ailleurs, cette classification étant très ramifiée, il est souvent possible de subdiviser un sujet grâce à des tables additionnelles (par exemple les pays du monde).

Pourquoi avoir choisi la classification de la Bibliothèque du Congrès ?

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Pour un libre accès du type de celui de l'INHA, la classification du Congrès présente des avantages majeurs, qui ont guidé ce choix
 

  • La LCC offre des possibilités quasiment illimitées de donner un sujet précis sous une forme ramassée. En effet, les classes et sous-classes peuvent combiner de 1 à 3 lettres, puis, à l'intérieur de chaque sous-classe, l'indice algébrique s'étend de 1 à 9999, sans compter les extensions.
     
  • La classification du Congrès est caractérisée par un pragmatisme fondamental : cela vient de ce qu’elle a été développée pour classer une bibliothèque réelle, par opposition à des classifications systématiques développées comme des systèmes intellectuels, notamment les plus utilisées en bibliothèques : la classification décimale de Dewey et la Classification décimale universelle (CDU).
     
  • La LCC est la classification majoritairement utilisée par les bibliothèques universitaires et par les bibliothèques de musées aux États-Unis pour coter leur collection. La plupart reprennent les indices attribués par la bibliothèque du Congrès, responsable de cette classification et de son évolution. D'ailleurs, les ouvrages publiés aux États-Unis se voient attribuer un indice LCC avant leur impression (cet indice figure au verso de la page de titre). Ce dispositif a été utilisé par l'INHA pour récupérer des indices auprès de bibliothèques de référence, comme celles du Getty Research Institute ou du Metropolitan Museum of Art de New York.

 

De fait, on peut mesurer dans ce choix d'une classification l'importance du modèle des bibliothèques américaines, qui a joué un rôle fondamental dans la conception de la bibliothèque de l'INHA. C'est notamment la demande d'un vaste libre accès, à l'image des bibliothèques américaines, qui a motivé l'attribution de la salle Labrouste à l'INHA.

En revanche, le choix de cette classification posait des difficultés

  • Il s'agit d'une classification en anglais qui n'a jamais été traduite : ainsi, à l'INHA on a gardé l'anglais dans les classements alphabétiques.
Exemples  
N7638.S7 Le portrait féminin en Espagne. En effet, S7 = Spain.
ND1460.B66 Sujets de la peinture, le livre (book)
  • Il s'agit d'une classification très peu utilisée en Europe et en France (bien qu'elle ait été introduite en 1937 au musée de l'Homme par Yvonne Oddon, qui avait été stagiaire à la bibliothèque du Congrès).

 

Ces inconvénients ont donné lieu à un long travail d'appropriation de cet outil par les bibliothécaires, ainsi qu'à une réflexion sur l’adaptation de la classification au contexte de la bibliothèque de l'INHA

Les adaptations de la classification de la Bibliothèque du Congrès à l'INHA

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En dehors de la question de la traduction, l’adaptation de la LCC était nécessaire avant tout parce que l'organisation conceptuelle du libre accès par corpus était déjà établie. Les corpus définis par l'INHA ne correspondaient pas tous à des classes de la LCC, et c'est la classification qu'on a préféré adapter plutôt que de revenir sur l'organisation préalable en corpus.

Par ailleurs, la bibliothèque de l'INHA étant spécialisée, il a été décidé de se limiter à une partie restreinte de la classification, essentiellement les sections art et archéologie. On a donc cherché à faire correspondre à chaque corpus une classe ou un nombre limité de classes. Or, paradoxalement, lorsqu'on récupère les indices des bibliothèques américaines, on constate que de nombreux ouvrages choisis pour le libre accès n'ont pas un indice appartenant aux classes retenues par l'INHA.

Ainsi, plusieurs ouvrages sur le christianisme vu dans son rapport avec l’esthétique se classent naturellement en religion (classe B, indice BR115.A8). Cette classe n'étant pas utilisée à l'INHA, il a fallu réorienter les ouvrages dans la section "Art", à l'indice "Art en rapport avec la religion" (N72.R4).
 

De la même façon, une partie des ouvrages sur l'histoire du vêtement relève de la classe Coutumes et Folklore (GT) et a été reclassée dans la section des Arts décoratifs (NK) consacrée à la mode. D'autres règles de mapping ont été appliqués entre les autres classes.

Au-delà de ces réorientations d'ouvrages, le projet de recotation du libre accès a donné lieu des adaptations plus importantes de la classification :
 

  • La LCC ne permet pas de classer tous les ouvrages sur les artistes en un seul ensemble, car elle les répartit selon le pays d'origine et le sujet précis de l'ouvrage. Ainsi, une monographie sur l’œuvre de Max Ernst en général est classée dans la section "histoire de l'art allemand, par artiste" (N6888.E7), mais un ouvrage sur ses peintures est classé en "histoire de la peinture allemande, par artiste" (ND588.E75) et un ouvrage sur ses lithographies est classé en "histoire de la lithographie allemande, par artiste" (NE2350.5.E7). Or le projet du corpus Artistes à l'INHA est précisément de regrouper les monographies de tout type portant sur un artiste (biographies, écrits et correspondance, catalogues raisonnés et catalogues d'exposition, études monographiques). Pour cela, les sous-classes NY et NZ, qui n'existent pas en LCC, ont été créées. Tous les ouvrages sur Ernst en libre accès sont donc disponibles sous les indices NZ ERNS9.A1 (écrits de Max Ernst), NZ ERNS9.A2 (catalogues raisonnés), NZ ERNS9.A3 (monographies, catalogues d'exposition) et NZ ERNS9.A35 (œuvre gravée).
     
  • La sous-classe AM a été utilisée pour la muséologie et les ouvrages généraux sur les musées, pour les catalogues de musées individuels et pour le collectionnisme. La section prévue dans la LCC pour les catalogues de musée (N400 - N5299) n'a pas été utilisée à l'INHA, afin de mieux distinguer les corpus Musées et Art.
     
  • Les classes D, E et F sont les classes "Histoire". Elles permettent de classer les ouvrages d'histoire de façon chronologique, mais aussi selon la zone géographique qu'ils couvrent. À l'INHA, les classes D, E et F ont donc été utilisées pour classer les ouvrages d'archéologie, mais aussi les ouvrages sur les monuments et l'architecture des villes, qui devraient se trouver en architecture (NA), selon la LCC. C'est ainsi que le concept de corpus Archéologie et Topographie, propre à l'INHA, a été réalisé en utilisant les ressources de la classification.
    Exemple : un ouvrage sur l'architecture de la Sainte-Chapelle est classé à l'INHA à l'indice "Histoire de Paris, par bâtiment" (DC774.S3), alors que la classification du Congrès lui attribuerait un indice en "Architecture religieuse de Paris, par bâtiment" (NA5550.S7).
     
  • afin de constituer un seul ensemble pour la photographie et le cinéma, les indices prévus pour le cinéma en LCC (la sous-classe PN) ont été convertis en indices TR (sous-classe de la photographie).


Il résulte de ce travail d’adaptation sur mesure un classement unique, largement différent des collections de libre accès classées selon la LCC dans les bibliothèques américaines. Après cette introduction, les différents corpus seront décrits en détail dans de prochains articles de la rubrique professionnelle.